Arrêt n°20VE03265 Société Combray Energie

Décision de justice
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L’arrêté préfectoral refusant d’autoriser l’implantation d’éoliennes au sud-ouest de la commune d’Illiers-Combray (Eure-et-Loir) est légal

La légalité des décisions préfectorales autorisant ou refusant les projets d’implantation d’éoliennes terrestres est contrôlée en premier et dernier ressort par les cours administratives d’appel.

La cour administrative d’appel de Versailles a été saisie par la société Combray Energie d’une requête tendant à l’annulation de l’arrêté de la préfète d’Eure-et-Loir du 15 octobre 2020 refusant de l’autoriser à implanter huit éoliennes d’une hauteur de 150 mètres à 5 kilomètres au sud - ouest d’Illiers-Combray. Ce projet était contesté par l’Association de défense de l’environnement des riverains de la Thironne (ADERT) et la Société des amis de Marcel Proust et des amis de Combray, qui sont intervenues dans cette instance.

Les autorisations d’implantation d’éoliennes ne peuvent être accordées, conformément aux articles L. 181-3 et L 511-1 du code de l’environnement, lorsque le projet porte notamment atteinte à la protection des paysages. La cour a précisé à cet égard que l’exigence de protection des paysages peut justifier un refus d’implantation d’éoliennes motivé par la préservation d’un paysage présentant une composante immatérielle liée à son évocation au sein d’une œuvre littéraire reconnue.

En l’espèce, la cour a relevé que la partie de la commune d’Illiers-Combray située à l’ouest en direction de la zone d’implantation projetée, a été classée comme un site patrimonial remarquable (SPR) qui a pour objet de protéger, conserver et mettre en valeur son patrimoine culturel et notamment, en l’espèce, l’esthétique du bourg et de son clocher ainsi que le parcours pédestre de découverte de plusieurs sites liés à la vie ou à l’œuvre de Marcel Proust. En outre, le clocher de l’église d’Illiers-Combray et le jardin romantique à l’anglaise du Pré Catelan situé à proximité près du Loir, dessiné par Jules Amiot, oncle de Marcel Proust, font l’objet d’un classement au titre des Monuments historiques.

La cour a également relevé que les pièces versées au dossier de l’instruction font apparaitre que les éoliennes faisant l’objet du projet litigieux, si elles étaient installées, seraient très clairement visibles depuis certains lieux se situant au sein du périmètre de ce site patrimonial remarquable d’Illiers-Combray ou à sa périphérie, notamment à l’entrée du village depuis la route départementale 921, à plusieurs endroits des circuits pédestres qui serpentent à l’intérieur ou à l’extérieur de ce site, et en particulier depuis le hameau de Tansonville, aux abords du moulin de la Ronce, sur l’itinéraire du sentier du côté de Méséglise et à Méréglise, dans le prolongement du clocher de l’église. Marcel Proust a décrit la plupart de ces lieux, où il passait des vacances lorsqu’il était enfant, dans la première partie de son roman « Du côté de chez Swann », intitulée « Combray », publié en 1913.

Eu égard à l’ensemble de ces éléments et notamment à la configuration des lieux, à la taille des éoliennes projetées et à ces enjeux de co-visibilité, la réalisation du projet de parc éolien de la vallée de la Thironne risquerait de porter une atteinte excessive non seulement à deux monuments historiques, mais aussi à ce site remarquable classé et à l’intérêt paysager et patrimonial du village d’Illiers-Combray, où des acteurs publics et privés réalisent des actions culturelles autour de Marcel Proust et de son œuvre littéraire particulièrement reconnue, dont les évocations sont pour partie matériellement inscrites dans ces lieux.

La cour administrative d’appel de Versailles, par un arrêt du 11 avril 2022, a dès lors rejeté la requête formée par la société Combray Energie contre la décision de refus d’implantation d’éoliennes qui lui avait été opposée par la Préfète d’Eure-et-Loir.

Retrouvez l'arrêt de la cour ici